Les pétroliers nord-américains défient la planète
Au
moment où Jacques Chirac lance ce qui devrait devenir pour l’histoire
l’appel de Paris en faveur d’une révolution pour l’environnement, le
Canada va quintupler, sous la pression des Américains sa production de
pétrole à partir de sables bitumineux. Une catastrophe écologique
en perspective. Outre les dégâts sur un environnement très fragile,
l’extraction d’un seul baril de pétrole des sables bitumineux de
l’Alberta génère plus de 80 kg de gaz à effet de serre (GES) et entraîne le rejet de plusieurs fois son volume en eaux usées dans les bassins de décantation.
Il y a un an, dans son discours sur l’état de l’Union, le président George W. Bush avait déploré la dépendance des Etats-Unis à l’égard des importations en provenance du Moyen-Orient et avait
proposé de réduire des trois quarts les importations de pétrole
provenant de cette région. Mais, ce que l’on perd d’un côté, il faut
bien le retrouver ailleurs. Et, cet ailleurs, ce fournisseur proche et
sûr a pour nom Canada déjà le principal exportateur de pétrole aux
États-Unis.
Pour atteindre cet objectif
fixé à court terme, une seule solution développer l’exploitation des sables
bitumineux de l’Alberta dont les réserves contiendraient un volume de bitume
d’environ 1,7 trillion de barils. La réalisation de cet objectif nécessitera
également de construire de nouvelles raffineries et de nouveaux oléoducs pour
transporter le brut albertain aussi loin qu’en Californie et dans le sud du
Texas. Autant dire que le projet inquiète d’autant qu’un document co-produit
par le ministère canadien des Ressources naturelles, recommande aux
gouvernements canadien et albertain de simplifier le processus d’approbation
environnementale pour les projets énergétiques.
Les sables bitumineux sont un mélange de bitume brut, qui est une forme semi-solide de pétrole brut de sable, d’argile minérale et de l’eau. Leurs gisements représentent une importante source de pétrole brut de synthèse et se trouvent notamment au canada dans l’Etat de l’Alberta et au Vénézuela dans le bassin du fleuve Orénoque. Ce bitume n’est pas à proprement parler du pétrole, il est au moins cent fois plus visqueux et nettement plus dense. Pour comparer à égalité ce bitume avec des réserves de pétrole conventionnel, il faut déduire l’énergie nécessaire à son extraction et sa transformation. L’envolée du cours du baril a rendu son exploitation économiquement rentable depuis quelques années.
Son extraction, principalement de type minier, à ciel ouvert avec des camions de carrière de 300 tonnes, et sa transformation en usine sont en revanche catastrophiques au plan écologique pour la forêt boréal et les tourbières qui jouent un rôle important de pièges à carbone. Il faut traiter deux tonnes de sable environ pour récupérer un seul baril de bitume. Trop visqueux pour être transporté par canalisation et donc commercialisable, il faut soit lui ajouter des diluants soit, le transformer chimiquement pour obtenir un mélange proche d’un pétrole brut de bonne qualité. Or, cette transformation rejette dans l’atmosphère des gaz toxiques tels que l’anhydride sulfureux responsable de l’acidification des lacs et des forêts et constitue une source importante de pollution. Cette activité qui demande de grandes quantités d’eau et génère énormément de gaz carbonique, amènerait suivant la tendance actuelle, le Canada à dépasser de 44% les niveaux permis par le Protocole de Kyoto en 2010.
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